samedi 9 mai 2015

Journal Métro de Montréal fin avril 2015

Voici trois photos que j"ai prises publiées sur le site du journal Métro de Montréal le 24 avril 2015

http://journalmetro.com/dossiers/mon-scoop/763140/exposition-desaparecidos/#



À l’UQAM, on peut voir une exposition attirant l’attention sur les 43 étudiants disparus au Mexique en septembre dernier.

http://journalmetro.com/dossiers/mon-scoop/763135/demonstration-de-danse-de-rue-a-berri-uqam/ 



Jeudi soir, une démonstration de danse de rue a eu lieu à la station de métro Berri-UQAM.

http://journalmetro.com/dossiers/mon-scoop/763131/autobus-en-feu-sur-lechangeur-turcot/

lundi 26 janvier 2015

Dieu bénisse l'Amérique, de Mark SaFranko. critique

En janvier 2015, j'ai eu le bonheur de lire ce livre et voici ma critique, que Mark a lue, ainsi que Karine, la traductrice. Les médias sociaux, c'est extraordinaires, quand même.

http://www.aubarfly.com/tim-lobster-a-lu-dieu-benisse-lamerique-de-mark-safranko/

Dieu bénisse l'Amérique, de Mark SaFranKo


Mark SaFranko


Mark SaFranKo, Dieu bénisse l’Amérique, 13e note éditions, Paris, 2012, excellemment traduit de l’anglais (États-Unis) par Karine Lalechère

L’alter ego de l’auteur, Max Zajack nous raconte sa jeunesse dans une famille pauvre d’émigrés polonais, quelque part en Amérique, côte est. Années 50, début 60, la pauvreté ressemble à une malédiction héréditaire. Le père de Max, Jake, enchaîne les petits boulots de crève-la-faim jusqu’à devenir pompier. Si l’on espère une amélioration de la situation familiale, on a tout faux. L’espoir n’est pas de mise. La misère crasse reste la même. Dans une société de classes comme celle des États-Unis d’après-guerre, aucune élévation de quelque sorte n’est possible. Bien au contraire. Jake se sent impuissant contre le sort qui s’acharne sur lui alors comme un rat en cage, il enrage et mord tout ce qui l’approche. Il cherche des coupables car il se dit victime d’un système qui le dépasse. Des coupables? Ce sont les Noirs, les « bamboulas… responsables de tous les maux de la Terre. » En plus d’être raciste, Jake est violent. Max reçoit des raclées environ toutes les dix pages, soit par son paternel, soit par ses camarades de classes prêts à t’estourbir ou à te brûler vif pour un regard de travers, soit par ses institutrices catholique qui répandent l’amour de Dieu à coups de torgnoles et de chicotte, soit par les gangs de rue que Max a le malheur de croiser. Quand ce n’est pas sa mère qui l’assomme en public ou le coiffeur qui lui plante sa paire de ciseaux dans le cou en clamsant raide net devant lui. Max, il n’a pas de chance.
Il grandit dans un monde apocalyptique peuplé de fous (sa mère Bash, l’oncle Henry, dans la rue, les voisins, au travail, les cinglés sont partout), de criminels (ses amis, ses collègues), de pédophiles et de demeurés bouseux (voir la rencontre familiale au Canada chez des éleveurs de porcs dont tous ne sont pas doués de la parole…). Les relations de Max avec les femmes, possible source d’espoir, relèvent du fiasco. Lorsqu’il se fait passer pour un membre du FBI afin de peloter la belle Sandy, la police lui tombe sur le paletot et la Mafia menace de l’éliminer. Les femmes, c’est dangereux.
            Ce livre se dévore comme on assiste en voyeur à une série d’accidents de la route, voire à une longue séance de torture. L’unique bouée de sauvetage est l’humour, seule distance possible entre la vie et le narrateur. Par exemple, lorsque son ami Joey lui explique la mécanique du sexe : « Tu plaçais ta bite à côté de celle de la fille… vous les frottiez l’une contre l’autre et au final, on obtenait un bébé. » Peu avant cette explication, le narrateur avait précisé : « Plus tard, je devais me rendre compte que sa théorie comportait quelques faiblesses. » Faiblesses ou pas, le sexe conduit toujours à la catastrophe.
            Pas besoin d’être sorti de la cuisse de Jupiter pour comprendre que contrairement au titre, Dieu à maudit l’Amérique. Comment poursuivre le bonheur quand le destin du peuple ouvrier est joué d’avance? Le rêve américain, c’est d’éviter de mourir trop vite. Et ce n’est pas joué d’avance. Quand tu ne meurs pas de faim ou de maladies transmises par les souris, les rats, les poux et la vermine, quand tu ne te suicides pas, quand tu survis à divers accidents plus scabreux les uns que les autres, quand on ne t’assomme pas ou quand tu ne te prends pas une balle perdue, le pays a toujours la possibilité de t’envoyer te faire tuer dans le Pacifique ou au Viet-Nam. Et l’avenir, dans tout ça? Max rêve d’une gigantesque explosion nucléaire qui règlerait ses problèmes.
            Dans sa post-face, l’éditeur Zslot Alapi affirme : « Le monde littéraire devrait avoir peur de ce roman… » et il a tout à fait raison car cette fiction secoue profondément le lecteur. Mark SaFranKo fait plus que du vrai et du beau genre Baudelaire, il frappe là où ça fait mal, à l’humain de base. Il torpille à jamais le roman d’apprentissage. La prose de SaFranKo, c’est du Zola désespéré qui a lu Bukowski, Fante et Carver. J’en suis resté estourbi.  


            Alain Raimbault

lundi 29 décembre 2014

Centre du livre et de la lecture Poitou-Charentes

http://lecoeuralouvrage.poitou-charentes.fr/auteurs/raimbault

Le Coeur à l'ouvrage - Biennale de la lecture 2014 


http://www.livre-poitoucharentes.org/alain-raimbault-a114.html 

Alain Raimbault


Alain Raimbault est un poète français né à Paris en 1966. Il emménage en Poitou-Charentes en 1976. Après avoir été enseignant de français, d'histoire et de géographie à Bressuire, il émigre au Canada en 1998 et obtient un poste d’enseignant à l’école francophone Ecole Rose-des-Vents en Nouvelle-Écosse. Il a publié des poèmes et des nouvelles dans diverses revues de la francophonie. Il écrit des romans pour la jeunesse, des recueils de poésies et des romans pour adultes.
littérature généralelittérature jeunesse
romanrécitpoésienouvelle

© ARaimbault
Derniers ouvrages parus : 
  • Un trou dans le coeur, Soulières éditeur, 2011 (jeunesse)
  • L'Eléphant Plume et le rat Bougri, éd. Bouton d’or Acadie, 2011 (jeunesse)
  • Inventaire du Sud, éditions L'instant même, 2010

Contact : 
araimbault66@hotmail.fr

Site : http://www.litterature.org/recherche/ecrivains/raimbault-alain-915/date/#oeuvres
En savoir plus : 
En 2006, il a obtenu le prix Grand-Pré pour l'ensemble de son œuvre et en 2007 le prix Émile-Ollivier remis par le Conseil supérieur de la langue française à Québec.

Animations : 
  • Tables rondes - débats
  • Conférences
Publics : 
  • Salons et festivals

Mise à jour le mercredi 31 août 2011


Saison de Porcs, de Gary Victor

Saison de Porcs, de Gary Victor, éditions Mémoire d'encrier, Montréal, 2009

http://parolenarchipel.com/2014/12/29/saison-de-porcs/

Saison de porcs

http://memoiredencrier.com/saison-de-porcs/

Quelques temps après la mystérieuse affaire des Cloches de la Brésilienne¹, où justement quelqu’un ou quelque esprit avait volé le son des cloches, nous retrouvons l’incorruptible inspecteur Dieuswalwe Azémar, incurable alcoolique aux prises avec des personnes qui se transforment en cochon et avec une créature diabolique qui lui veut le plus grand mal. Si le désir de justice absolue dans un monde corrompu jusqu’à la moelle maintenait jusqu’alors l’inspecteur dans une relative droiture moral, dès les premières pages de Saison de porcs, cette posture en prend un coup. L’inspecteur, pour ne pas terminer haché menu, assassine froidement le puissant boko Marassa et un de ses gardes du corps qui retenaient prisonnière la fille d’une amie. Le roman commence mal pour l’inspecteur.
Nous apprenons ensuite qu’il a confié sa fille adoptive Mireya, personnage capital dans le roman précédent, à une institution gérée par l’Église du Sang des Apôtres où Sister Marie-Josée et Sister Moon font la pluie et le beau temps. L’inspecteur déteste ces deux sœurs, il déteste cette école privée mais il reconnaît leurs excellents résultats dans le domaine de l’éducation. Il a accepté que cette institution donne Mireya pour une adoption internationale car il veut éviter à sa fille une vie misérable en Haïti.
Mireya est sur le point de partir quand Dieuswalwe Azémar découvre des manœuvres pas vraiment catholiques de la part de Sister Moon. À cela s’ajoute la présence d’un tueur vénézuélien protégé par un étrange sénateur sur fond de magouilles internationales. Un vrai sac de nœuds dans lequel Mireya semble être la première victime. Comment Dieuswalwe Azémar va-t-il dénouer les énigmes ? Parviendra-t-il à sauver sa fille et sa carrière menacée par l’enquête engendrée par le double meurtre du début?
Après Les cloches de la BrésilienneSaison de porcs nous offre également des éléments fantastiques auxquels le lecteur croit sans hésiter car ils menacent directement la vie de l’inspecteur aux prises, de plus,  avec les réalités quotidiennes suivantes: l’alcool, la corruption, la violence, la trahison, le tout sous une insupportable chaleur. Dieuswalwe Azémar semble également avoir entrepris un naufrage moral car il commet deux meurtres dès le début du roman et son intégrité, malgré ses réflexions qui dénoncent toutes formes de corruption, vacille. Il sait que ses principes moraux, page 21 « … avaient fait de lui un raté dont se gaussaient, derrière son dos, ses camarades policiers. » Il croit donc représenter un idéal de justice en matière judiciaire, mais ses actions semblent le contredire.
Si le roman policier social met en évidence et exagère les travers de la société afin de mieux les dénoncer, Gary Victor remplit à merveille sa mission. Mais il y a plus. Le roman se passe en Haïti, terre des loas, des esprits, des loups garous, de Baron Samedi et de tout un panthéon qui prend la parole pour crier une identité. Cette dimension fantastique, spirituelle fait de ce roman plus qu’un simple divertissement policier. Nous avons affaire à une véritable œuvre littéraire. Le roman policier sous la plume de Gary Victor est de la vraie et grande littérature, Dieu soit loué !
Alain Raimbault
¹ Les cloches de la Brésilienne, éditions Vents d’ailleurs, France, 2006

Saison de porcs de Gary Victor: Dompter le chaos

Je ne savais pas que la vie serait si longue après la mort

http://parolenarchipel.com/2014/12/28/je-ne-savais-pas-que-la-vie-serait-si-longue-apres-la-mort/

Parole en archipel


Je ne savais pas que la vie serait si longue après la mort, recueil de nouvelles fantastiques, sous la direction de Gary Victor, éditions Mémoire d’encrier, Montréal, 2012, 108 pages
À la suite d’un « atelier d’écriture en littérature fantastique », l’écrivain Gary Victor finit par choisir une dizaines de textes. Cela constitue, si je ne me trompe pas, le premier recueil officiel de nouvelles fantastiques d’auteurs haïtiens. Je dis bien officiel car de nombreux recueils de nouvelles haïtiennes sont traversés par la veine du fantastique, peut-être pourrait-on dire aussi du réel merveilleux, si l’on considère que les références au surnaturel, au vaudou, font partie de l’univers littéraire fantastique.
Neuf auteurs : Alfonce Marc Edwidge, Rose Taina Gachette, Jean Délino Gaspard, Glaude Japhet, Larissa Saskya Leroy, Djenika Mars, Paola Medjine Paul, Monestime Pierre Richard, Évains Wêche. Dix nouvelles par où le fantastique s’infiltre par l’intermédiaire d’un coma et de rêves, d’un vent violent, d’une maison hantée, d’une chaîne, d’un livre, d’un tableau, d’un miroir, d’un sorcier (boko) et d’un esprit malin, narrateur de l’histoire qui traque « les âmes vendues ». Les nouvelles plutôt inégales au niveau de leur qualité littéraire ont toutes un charme indéniable. Le lecteur est surpris par l’action, par la narration, par les personnages et par la richesse de l’imaginaire. Plusieurs textes se détachent, comme « Boulvari », de Évains Wêche, un auteur vraiment sûr de sa plume et dont j’espère avec impatience d’autres textes, qui voit non pas une, comme ce à quoi on s’attendrait, mais deux nouvelles publiées dans ce recueil. La jeune Paola Medjine Paul nous donne une belle leçon d’écriture du haut de ses dix-neuf ans avec son « Obsession picturale » et « Le livre », de Monestime Pierre Richard, offre une percutante réflexion sur le pouvoir des mots, sur le rapport troublant entre narration et réalité.
J.M.G. Le Clézio affirme page 50 dans « Ailleurs. », un livre d’entretiens publié chez Arléa en 1995 : « Je crois que toutes les sociétés amérindiennes sont marquées par cette possibilité du recours au rêve. Elles ne considèrent pas le réel comme la solution définitive à tous les problèmes. » Cet excellent recueil de nouvelles en est la parfaite illustration, même si la société haïtienne n’est pas amérindienne. Quoique, en fouillant du côté des symboles, de l’imaginaire, des représentations culturelles, il y ait bien encore des traces. En tous cas, Poe et Maupassant n’ont qu’à bien se tenir dans leur tombe, la relève est assurée.
Alain Raimbault



lundi 15 décembre 2014

Collier de débris, de Gary Victor

http://parolenarchipel.com/2014/12/14/collier-de-debris/

À la frontière entre la chronique, le récit et la fiction, le reportage et le roman, Collier de débris est raconté par une femme qui a trouvé un travail temporaire après le tremblement de terre  du 12 janvier 2010. Avec l’argent qu’elle va gagner, elle va continuer d’envoyer sa fille à l’école. Son mari et son fils ont péri dans la catastrophe.  Elle n’a même pas pu voir leur corps. Que reste-t-il quand la terre cesse de trembler? Des débris. (p. 14) « Les débris sont partout. Ils sont des ratures devant nos yeux, des pièges empoisonnés à l’affût de nos sens… Dans notre mort, les débris assiègent notre au-delà. » La narratrice est engagée dans une équipe de déblaiement. Les débris enlevés vont se transformer en salaire, en « or gris ».
Après avoir tué en tombant, ils deviennent source de richesse en étant enlevés. (p.26) « Voilà que ces mêmes débris reculaient l’horizon du chômage, de la faim, d’une possible prostitution. Ils nous permettaient, à ma fille et à moi, de survivre sur cette terre où nous étions des éternelles oubliées. » C’est un des programmes de l’ONU : Cash for work, de l’argent contre du travail. Après un début difficile, le programme se transforme en Cash for Production. Plutôt que d’être payé pour un travail effectué ou non, l’employé sera rémunéré selon sa productivité. Plus il déblaiera de débris et mieux il sera payé. La femme se lance alors avec une telle détermination dans cette tâche qu’elle devient très vite une spécialiste du déblaiement et elle est nommée chef d’équipe.
Le fer est récupéré et revendu, les débris concassés sont transformés en gravier, en pavés, en « adoquins ». Les débris offrent des possibilités d’emploi.  (p. 57) « Dans ce centre de recyclage, on enseignait aux jeunes de la zone un savoir-faire capable de les rendre autonomes. Ils pouvaient devenir des entrepreneurs, créer des emplois. » Mais le plus dur n’est pas le travail mais la découverte d’ossements humains qui rappelle à chacun ses morts et sa propre mort. Page 62, l’auteur laisse libre cours à sa poésie en amoncelant les mots comme chutent les débris : « Débris étaux débris marteaux débris glue débris entraves débris chutes débris boulets débris glauques débris glaire débris mangeurs de vie débris rictus débris bave… » À la fin, la narratrice parviendra-t-elle à s’acheter une petite maison grâce à ses économies?
Cette chronique, comme il est écrit sous le titre, se lit comme un roman narré à la première personne. C’est en effet un texte très personnel. L’auteur se dévoile dans le prologue : « … j’essayais de surmonter mon choc émotionnel.» Plus loin, il poursuit : «… ma volonté ne parvenait pas vraiment à réfréner un besoin presque instinctif de se détourner du spectacle de la catastrophe… » Finalement, il conclut : « Collier de débris m’a permis de renaître, de me dégager des miasmes émotionnels du séisme. L’espoir qui ne meurt jamais dans le cœur des oubliés a rallumé le mien. »
Le lecteur suit chronologiquement la vie d’une femme en partant du séisme jusqu’à la fin du déblaiement. Il met en relief le courage d’un peuple, des femmes, qui, loin de se laisser abattre par leur chagrin, travaillent sang et eau pour construire l’avenir. La narratrice saisit l’arme qui a tué la moitié de sa famille, les débris, et la transforme en source d’espoir. Une très belle leçon de courage dans un style clair, concis, direct et parfois poétique.
Si la norme actuelle en matière d’esthétique est de privilégier la vérité, on veut croire à ce qu’on lit, aux dépends de la beauté, eh bien il existe en Haïti un auteur qui excelle dans les deux domaines. Il s’appelle Gary Victor et son œuvre est considérable. Vous connaissez?
Alain Raimbault
Gary Victor, Collier de débris, 82 pages, éditions Mémoire d’encrier, collection chronique, Montréal, 2013