vendredi 28 juin 2019

Qaanaaq, de Mo Malø

Qaanaaq, de Mo Malø, éd.Points policiers




















Voici une petite lecture d’été pour vous rafraîchir les idées. Au Groenland, on se tue à tire larigot avec une arme nonoukéenne. Mais le capitaine Qaanaaq Adriensen de la Crim de Copenhague, envoyé à Nuuk la nocture pour résoudre au plus vite cette sombre affaire n’y croit pas beaucoup. Si un ours avait vraiment tué les 3 employés d’une plate forme pétrolière, les traces qu’il aurait laissées après avoir ouvert la porte et lavé la bouche de ses victimes auraient été bien différentes. Soyons sérieux. Entre les intérêts des compagnies pétrolières, ceux des indépendantistes, des hommes politiques au pouvoir et d’une jolie policière ambitieuse s’ajoute le mystère de l’assassinat des parents de notre fameux Qaanaaq, né dans son prénom mais adopté très jeune par une famille danoise. Il va ramer fort et y laisser quelques plumes (son papa adoptif était un célèbre écrivain, qu’il déteste) avant d’arriver à une vérité explosive. Tous des pourris, ou presque. Une formidable plongée en Arctique.


Comme j’ai lu plus tôt l’excellent Boréal, de Sonja Dezongle, j’ai bien sûr fait des comparaisons, et à part quelques points communs, inévitables je pense, ces deux romans sont bien différents. Aussi, je n’ai pas lu ce roman assez vite car je me suis perdu dans les noms en -sien. Ceux en -uk, ça va. C’est ma faute, fallait lire ce livre en deux jours pour ne rien oublier. Je suis le seul coupable. J’ai bien aimé le début, et j’ai beaucoup aimé la deuxième partie, et j’ai adoré la fin. Enfin, comme je suis allé faire moi-même un petit tour en Arctique en février, j’ai pu me représenter avec plus de facilité les paysages et la réalité des gens du grand nord. Re-enfin, je suis sur un célèbre réseau de visage livre un certain Nuka Møller, de Nuuk, et je dois dire que grâce à lui je me balade au Groenland tous les soirs. Et comme on dit en espagnol, Malø, il est buenø ! 






dimanche 23 juin 2019

Victor Hugo, auteur de polar... japonais.

Les Misérables, de Hugo, fut le premier polar que j'ai lu, et j'ai adoré. J'avais 16 ans. Par la suite, preuve que Hugo est un génial auteur de polar, l'inspecteur Javert, à la fin d'une série de 1 gros tome, se suicide. Fin des enquêtes de l'inspecteur Javert, Aujourd'hui, ils sont increvables, les inspecteurs, ou les capitaines. Il se font battre, torturer, frapper, couper, voler, violer, brûler, abattre, enlever, noyer, envoyé en camp d'extermination, le tome suivant, ils retournent au turbin l'air de rien. Et ça recommence. Victor Hugo, un auteur de polar... japonais! 

lundi 17 juin 2019

Georges Bonnet, poète

Georges Bonnet, poète

Le poète Georges Bonnet a eu cent ans le 9 juin 2019! Un siècle d’existence.

Lorsque j’étais élève de Terminale A2 au lycée Camille Guérin de Poitiers, en 1983, mon camarade de classe Ludovic (Nibaudeau, je crois) m’invita à rencontrer un poète qui lisait ses poèmes et qui lui prodiguait des conseils. Comme Ludovic savait que j’écrivais de la poésie, il pensa que cette rencontre me plairait. Un samedi, donc, je l’accompagnai chez le fameux poète. Je rencontre un vieux monsieur tout grand, bien droit, qui me parla en toute franchise. Il se présenta comme prof de sport, ce qu’il fut dans la vie. Il me raconta un jour qu’il avait eu un certain étudiant à l’université de Poitiers et qu’il devait le réveiller pour aller faire un match. Cet étudiant, c’était Guy Roux, qui deviendrait le célèbre entraîneur de l’AJ Auxerre. Moi, j’avais 17 ans, j’étais un gamin, monsieur Bonnet me tutoya.Il ne me donna en fait aucun conseil. Tout d’abord, j’écrivais encore en alexandrin. Il me fit découvrir que la poésie aujourd’hui ne s’écrivait plus du tout ainsi. Le vers était libre, depuis fort longtemps, et il m’encouragea à essayer. Donc, j’abandonnai l’alexandrin pour me lancer à coeur perdu dans la liberté. Ensuite, il relevait les vers qu’il aimait dans mes poèmes que je lui donnais à lire. Il me disait: C’est pas mal, ça. C’est pas mal. Il ne me donnait aucun conseil, il me montrait simplement ce que d’autres poètes écrivaient. Il me lisait aussi ses poèmes à lui, chez lui, dans sa belle et vieille maison, avec un escalier en colimaçon qui menait et qui mène encore à son petit bureau rempli de recueils de poésie. Il me fit ainsi découvrir Guy Valensol, un poète qui un jour m’offrit un de ses recueil dans la rue. J’avais l’impression qu’il se promenait ainsi armé d’un recueil et qu’il le tirait de sa poche pour l’offrir aux gens. Guy m’offrit “sucres lents” ( publié aux éditions du Typograph’, en septembre 1995. Son tirage, en Vendée, est de 125 exemplaires numérotés et j’ai le numéro 000121.) Le 10 février 1993, je passai chez lui, à Poitiers, et il m’offrait encore Le chant de la quéna, et Je ne mourrai pas, j’ai trop d’imagination. Monsieur Bonnet me fit aussi lire Odile Caradec, qui était bibliothécaire dans mon lycée! Madame Caradec affichait des poèmes sur la porte du CDI et bien souvent elle afficha les miens. Elle m’offrit les “Lettres à un jeune poète”, de Rilke, que je ne connaissais pas. Un livre extraordinaire pour le jeune poète que j’étais. Merci mille fois, madame Caradec! Un livre important dans ma vie. Monsieur Bonnet me fit lire “Terraqué”. de Guillevic, poète que lui et moi avons rencontré ensemble à Poitiers. Ensuite, monsieur Bonnet est allé souper avec lui, et lorsque je lui demandai comment s’était passée la soirée, il me répondit, déçu. Guillevic est un vieil homme. Un vieil homme. Il articule avec difficulté et lorsqu’il mange… il est vieux. J’en déduisis que la soirée s’était moins bien passée que prévu. Il me fit découvrir Maurice Fombeure, Jean-Paul Auxeméry, Thierry Guinhut, Jean-Claude Martin, Jean-François Mathé (à qui j’ai rendu visite un jour dans sa merveilleuse maison, un ancien moulin il me semble, près de Thouars où j’étais pion.), Daniel Reynaud et Jean-Claude Valin. Et Jean Rousselot. Et Nâzim Hikmet. Et j’en oublie. Mais je les ai lus!. Il m’a fait découvrir le vaste monde des revues de poésie. Avant de publier un livre, généralement, on publie en revues. Et c’est ce que j’ai fait. J’ai envoyé mes poèmes à des revues. Ainsi, en 1988, à 22 ans, j’ai publié mon premier poème. Joie incommensurable! J’étais enfin devenu un poète publié, un peu et quelque part. C’était un début. J’ai émigré au Canada en 1998, et en 2000, Georges Bonnet devenait romancier en publiant son premier roman, à 81 ans! On a beaucoup parlé de lui dans la presse. Lorsque je l’appelai, il me dit: Oui, ça me fait plaisir, bien sûr, mais c’est trop tard. Tu comprends, à mon âge. Trop tard pour lui, cette reconnaissance nationale, mais pas pour moi. J’étais infiniment heureux de voir sa trombine souriante dans Télérama. Le temps passe, sa vue baisse, il perd sa douce et tendre épouse qui me recevait toujours tranquillement, avec un sourire, et qui me témoignait de son admiration pour son mari, avant que celui-ci n’apparaisse dans le salon. Madame Bonnet, immense chagrin du poète quand elle est décédée. La maladie, d’abord, ensuite l’absence. Il l’aimait. Il me parlait toujours d’elle avant de me donner de ses nouvelles à lui. 

J’ai eu l’immense privilège d’avoir ainsi rencontré un professeur de poésie à l’adolescence. Aucun conseil. Mais toujours positif, bienveillant, disponible, je passais chez lui quand cela me chantait, et il m’a donné à lire. Quel privilège!!! 

J’ai donc commencé à publier des poèmes en revues dans plusieurs pays: France, Canada, Belgique, États-Unis, Haïti. J’ai publié 4 recueils de poésie, aux Éditions David, en Ontario, et grâce à André Duhaime je suis devenu haïkiste. J’ai eu le bonheur de participer à de nombreuses rencontres de poètes. Un qui m’a particulièrement touché fut Yves Boisvert, de l’Avenir. J’ai l’impression qu’il n’y a que les poètes qui lisent les poètes. Ce n’est pas grave. Grâce à Georges Bonnet, j’ai découvert des mondes. J’ai appris à lire avant d’écrire, et j’ai appris aussi que la plus belle façon d’enseigner était par l’exposition de sa passion. 

Aujourd’hui, j’écris encore de la poésie mais je ne la donne plus (ou très peu) à publier en revues. J’ai constaté que grâce aux réseaux sociaux il était facile de trouver des lecteurs (une dizaine au moins). Pourquoi pas? Je me sers de la toile. Mais j’ai le souvenir de l’époque héroïque des revues, avant internet. Celles qui survivent contre vents et marées, j’en achète. Le poème en revue, c’est irremplaçable. 

Le poésie de Georges Bonnet est pour moi sublime. Il est bien sûr le poète qui m’a le plus influencé. Pour conclure, ces vers, tirés de un ciel à hauteur d’homme, aux éditions L’escampette, en 2006: 




La brume se ferait pierre

si les arbres se taisaient





Photo prise par ma fille Arianna, âgée de 9 ans en 2005, avec et chez Georges Bonnet, poète de Poitiers qui m'a enseigné la poésie. J'avais 17 ans en 1983, cela fait donc plus de 30 ans que je le lis avec admiration. Parfois, nous nous écrivons.
en 2005






Voici les oeuvres que j’ai de lui.
Poésie

Poésie, 1983

Poésie, 1996






Je l’avais invité dans mon école, avec Jean-Claude Martin, à Bressuire où j’avais été nommé enseignant.







Poésie 2004







Poésie 2006








Roman, 2000


















Transcription

G. Bonnet 25 septembre 2001
Cher Alain,

Après deux mois et demi passés dans l’île
d’Oléron, je trouve à mon retour dans ma boîte
aux lettres ton envoi, ainsi que d’autres courriers
non retransmis par des facteurs remplaçants - je vais
me plaindre à la poste. Mais que dois-tu
penser de moi?
J’ai lu, bien sûr, ton recueil avec infiniment
de plaisir, découvrant à chaque poème de véritables
trouvailles - J’ai tout de suite été conquis. C’est
de la véritable, de l’excellente poésie. Je vais
montrer ton recueil à mes amis.
Il faut continuer, sans oublier romans pour
la jeunesse ou nouvelles, mais je crois que tu es
avant tout poète.
Je pourrais d’ailleurs dire la même chose de moi.
--------------------------------------------------------------------------------
J’ai certes eu plus de lecteurs avec un tel récit
qu’avec ma douzaine de recueils de poésie, et
ça me fait un peu mal au coeur.
Les louanges des grands journaux français, (je
t’envoie quelques extraits), ne me font pas
oublier que ma véritable “patrie” est celle de
la poésie.
Je vais avoir chez Flammarion un
deuxième récit, sans doute au début de
l’année prochaine, et au Dé bleu des poèmes
pour enfants.
J’aimerais que nous puissions nous voir
plus souvent.
Encore une fois merci.
Crois bien, mon cher Alain, en toute mon amitié
(Signature)





Roman, 2004
Roman, 2006

Dans Télérama du 6 mars 2006. Le poète se promène dans les rues de Poitiers, et dans le Parc Blossac.






Nouvelles, 2010







Moi à 18 ans

Moi à 19 ans




Liste de ses œuvres

  • La tête en ses jardins, Promesse, 1965
  • Le veilleur de javelles, ORACL, 1983
  • Aux mamelles du silence, Hautécriture, 1986
  • Une mort légère, La Bartavelle Éditeur, 1988
  • Les belles rondeurs de l'évidence, Hautécriture, 1989
  • Ce qui toujours s'approche, La Bartavelle Éditeur, 1991
  • De quoi en faire un monde, Le Vert Sacré, 1992
  • Dans une autre saison, Folle Avoine, 1993
  • Patience des jours, La Bartavelle Éditeur, 1994
  • Tout bien pesé, Le Dé bleu, 1996
  • Entre temps, Commune mesure, 1997
  • Remontée vers le jour, Rafael de Surtis, 1999
  • Un si bel été (roman), Flammarion, 2000, Prix du Livre en Poitou-Charentes.
  • Coquerets et coquerelles, Le Dé Bleu, septembre 2003
  • Un seul moment, L'Arrière Pays, 2004
  • Un bref moment de bonheur (roman), Flammarion, 2004
  • Lointains, Océanes, 2005,
  • Un ciel à hauteur d'homme, L'Escampette 2006
  • Les yeux des chiens ont toujours soif (roman), Le Temps qu'il fait, 2006 (réédité en 2014 chez le même dans la collection « Corps neuf »)
  • Un jour nous partirons (nouvelles), Le temps qu'il fait, 2008
  • Chaque regard est un adieu (nouvelles), Le temps qu'il fait, 2010
  • Entre deux mots la nuit (récit), L'Escampette, 2012
  • La claudication des jours (poèmes), L'Escampette, 2013
  • Derrière un rideau d'ombres (poèmes), Océanes, 2014
  • Juste avant la nuit (poèmes), Le Temps qu'il fait, 2016

source: Wikipédia, consulté le 16 juin 2019



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https://www.lanouvellerepublique.fr/a-la-une/le-poete-poitevin-georges-bonnet-s-est-eteint-a-101-ans

Le poète poitevin Georges Bonnet s'est éteint à 101 ans

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L'écrivain poitevin Georges Bonnet s'est éteint quelques mois avant ses 102 ans. Après une première carrière dans le sport, ce natif de Charente-Maritime a vécu une retraite consacrée à l'écriture de vingt-cinq recueils de poésie et romans.

"J'ai eu deux vies", aimait-il dire. Après une enfance paysanne à Pons, en Charente-Maritime, Georges Bonnet, né le 9 juin 1919, était arrivé à Poitiers comme professeur d'éducation physique et sportive à l'université. Ce gaillard d'1,87 m, au regard bleu ciel, s'est illustré comme handballeur de haut niveau. Une rue porte son nom sur le campus, depuis 2011.

Mais c'est une fois à la retraite, à 60 ans, qu'il a écouté la petite voix de l'écriture... Sa deuxième vie de poète et romancier a alors débuté. Prolifique, Georges Bonnet a publié vingt-cinq ouvrages, dont trois romans. Le plus célèbre, chez Flammarion, "Un si bel été" (2000), a vite été épuisé et lui a valu des pages dans Le Monde, Télérama, Le Nouvel Obs... Lui-même n'en revenait pas.

Georges Bonnet écrivait dans sa maison de la rue de la Trinité à Poitiers, à l'ombre du grand cèdre qu'il y avait planté en 1956. Dans son bureau dans les étages, rempli de livres nourriciers, il cultivait sa poésie terrienne, évoquait l'enfance, revenait aux sources. Une écriture simple, épurée et exigeante à la fois, toujours en quête du mot juste, approprié, sans fioritures ni artifices inutiles. Il fuyait la facilité, revenait sans cesse à son ouvrage jusqu'à la satisfaction d'avoir choisi le bon mot pour chaque chose.


J'ai bien vécu. J'ai été heureux
Georges Bonnet, écrivain Poitiers

L'écrivain poitevin Pierre Vignaud lui avait rendu hommage à l'occasion du centenaire du poète dans un essai intitulé "Le Cèdre centenaire, Hommage à Georges Bonnet" : "L'œuvre de Georges Bonnet est une vaste armoire de bois ciré emplie de souvenirs, écrit Pierre Vignaud. Son inspiration c'est l'enfance. Même quand il a écrit des livres de fiction, Georges Bonnet y a mis un peu de lui."

On retiendra le pudique "Les Yeux des chiens ont toujours soif", sur la rencontre de deux septuagénaires jusqu'alors solitaires et confinés, "Un jour nous partirons" où l'auteur parcourt en douze récits très sobres les différents âges de la vie, de l'enfance à la vieillesse souffrante, mais aussi le magnifique "Entre deux mots la nuit", récit poignant sur la lente agonie de la mémoire défaillante, inspiré de la douloureuse disparition de son épouse, Suzanne, atteinte de la maladie d'Alzheimer. "Elle reste figée, sans armes et sans larmes. La tendresse a perdu de son pouvoir. Tout ce qui s'offre à elle n'est que de passage."

Georges Bonnet n'écrivait plus ces dernières années. Après une chute, il avait dû quitter sa grande maison pour une chambre dans une maison de retraite. Celui qui aimait tant contempler la nature, avait peu à peu perdu la vue. Mais il restait étonnamment alerte de corps et d'esprit.

Peu après ses 101 ans, alors qu'il aimait toujours recevoir des journalistes, il repassait le film, avec des souvenirs intacts et faisait le point : "Le petit paysan que j'étais qui, enfant, gardait les vaches à la ferme, près de Royan, a réussi sa vie. J'ai bien vécu, j'ai été heureux."
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Poitiers : nul n'est poète en son pays, sauf Georges Bonnet, 101 ans

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Il a fêté ses 101 ans il y a un mois. Dans la chambre de l’Ehpad où il vit désormais, il confie que les journées sont longues. Mais ses souvenirs sont intacts.

Il a eu les honneurs de journaux comme Le Monde, Le Nouvel Observateur, Télérama… Georges Bonnet, auteur de poésie, prend toujours autant de plaisir à recevoir les journalistes. Désormais, ce n’est plus dans sa belle demeure de centre-ville, mais dans l’établissement pour personnes âgées où il réside depuis trois ans. Depuis sa chute. « Trois côtes cassées et la clavicule. Je n’avais pas le choix. Je ne pouvais plus rester chez moi. » Alors qu’il a fêté ses 101 ans, le 9 juin dernier, il admet « qu’on vit plutôt vieux dans la famille ».
« La poésie a transformé ma retraite »Fataliste, il lance dès la première minute de l’entretien : « Vous savez, en vieillissant, on perd ses amis ». Sans cynisme, il poursuit : « Soit parce qu’ils sont morts, soit parce qu’ils n’ont plus toute leur tête. » Lui, ne l’a pas perdue. « Mais je ne vois presque plus, me rendant la lecture impossible. Même regarder les matchs de rugby ou de hand à la télévision, devient difficile. »

Celui qui a été professeur d’éducation physique, et joueur de handball dans l’équipe de France, reste un passionné de sport. « Je n’ai pas de rhumatisme, tout juste un genou qui commence à donner des signes de fatigue. » Au milieu de la conversation, la kiné de l’Ehpad toque à la porte. « On marche deux fois par semaine. Mais uniquement dans les couloirs… » Le plus que centenaire regrette : « Il y a encore un an, j’allais déjeuner avec mon fils qui habite Poitiers, une fois par semaine. Je n’ai plus la force. » Ses deux autres fils habitent Montpellier et l’île d’Oléron. Heureusement, il reste le téléphone. « Mes amis m’appellent pour me lire des poèmes… »

« J’ai bien vécu, j’ai été heureux »La poésie, c’est l’autre vie de Georges Bonnet. Vingt-six recueils publiés sur le tard. « Au fond de moi, j’avais ça… » Intarissable sur le sujet : « La poésie, c’est chercher à dire, de manière différente, ce que tout le monde pense ». Il déclame du Ronsard : « Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle… » Pensif, le poète confie : « La poésie a transformé ma retraite. Grâce à elle, j’ai nagé dans des eaux plus actives… » Il ajoute : « Le petit paysan que j’étais qui, enfant, gardait les vaches à la ferme, près de Royan, a réussi sa vie. J’ai bien vécu, j’ai été heureux. »

Son seul regret ? « Que mon grand frère et ma mère soient morts avant que d’avoir publié mon premier recueil de poésie. Je sais qu’ils auraient été heureux. Mon grand frère, de 17 ans mon aîné, je lui dois beaucoup. Il appréciait la poésie. » Des années plus tard, le petit Georges découvre Villon, La Fontaine, Verlaine… « J’étais un élève moyen mais bon en français. J’aimais la littérature. » Pourtant, il abandonne sa licence de philosophie pour l’amour du sport. Il dit, très sérieusement : « Dans la vie, il faut bien choisir sa femme et son métier. » Avec Suzanne, il a été comblé. « Jusqu’au bout, même quand elle perdait la mémoire, elle m’a toujours reconnu. » Le poète a écrit trois romans dont Les yeux des chiens ont toujours soif. « Une histoire d’amour qui se passe à Blossac, entre deux vieux. » Suzanne et les livres… Les deux amours de Georges Bonnet. « L’époque où l’odeur du lilas blanc entrait dans la maison… » comme il écrit si joliment dans l’ode à sa douce Suzanne, Entre deux mots la nuit.