lundi 29 décembre 2014

Je ne savais pas que la vie serait si longue après la mort

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Je ne savais pas que la vie serait si longue après la mort, recueil de nouvelles fantastiques, sous la direction de Gary Victor, éditions Mémoire d’encrier, Montréal, 2012, 108 pages
À la suite d’un « atelier d’écriture en littérature fantastique », l’écrivain Gary Victor finit par choisir une dizaines de textes. Cela constitue, si je ne me trompe pas, le premier recueil officiel de nouvelles fantastiques d’auteurs haïtiens. Je dis bien officiel car de nombreux recueils de nouvelles haïtiennes sont traversés par la veine du fantastique, peut-être pourrait-on dire aussi du réel merveilleux, si l’on considère que les références au surnaturel, au vaudou, font partie de l’univers littéraire fantastique.
Neuf auteurs : Alfonce Marc Edwidge, Rose Taina Gachette, Jean Délino Gaspard, Glaude Japhet, Larissa Saskya Leroy, Djenika Mars, Paola Medjine Paul, Monestime Pierre Richard, Évains Wêche. Dix nouvelles par où le fantastique s’infiltre par l’intermédiaire d’un coma et de rêves, d’un vent violent, d’une maison hantée, d’une chaîne, d’un livre, d’un tableau, d’un miroir, d’un sorcier (boko) et d’un esprit malin, narrateur de l’histoire qui traque « les âmes vendues ». Les nouvelles plutôt inégales au niveau de leur qualité littéraire ont toutes un charme indéniable. Le lecteur est surpris par l’action, par la narration, par les personnages et par la richesse de l’imaginaire. Plusieurs textes se détachent, comme « Boulvari », de Évains Wêche, un auteur vraiment sûr de sa plume et dont j’espère avec impatience d’autres textes, qui voit non pas une, comme ce à quoi on s’attendrait, mais deux nouvelles publiées dans ce recueil. La jeune Paola Medjine Paul nous donne une belle leçon d’écriture du haut de ses dix-neuf ans avec son « Obsession picturale » et « Le livre », de Monestime Pierre Richard, offre une percutante réflexion sur le pouvoir des mots, sur le rapport troublant entre narration et réalité.
J.M.G. Le Clézio affirme page 50 dans « Ailleurs. », un livre d’entretiens publié chez Arléa en 1995 : « Je crois que toutes les sociétés amérindiennes sont marquées par cette possibilité du recours au rêve. Elles ne considèrent pas le réel comme la solution définitive à tous les problèmes. » Cet excellent recueil de nouvelles en est la parfaite illustration, même si la société haïtienne n’est pas amérindienne. Quoique, en fouillant du côté des symboles, de l’imaginaire, des représentations culturelles, il y ait bien encore des traces. En tous cas, Poe et Maupassant n’ont qu’à bien se tenir dans leur tombe, la relève est assurée.
Alain Raimbault



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