samedi 3 octobre 2020

Arthur Zingaro: Même les extincteurs rêvent de gloire

 Lu le roman d’Arthur Zingaro (pseudo chevaleresque de Ludovic Lavaissière): Même les extincteurs rêvent de gloire. Illustré à la mine graphite par Portraits Katia L.B. Les éditions du Horsain (France) 2020. Préface de Richard qui s’appelle pas Galli. 


J’ai eu un peu de mal à entrer dans l’univers du fameux extincteur car Arthur Zingaro n’écrit pas, il est cri. Comment aborder les cris d’un auteur sans marquer un temps de recul, de surprise, d’étonnement, d’interrogation? Dans quel monde est-ce que je viens de mettre le nez? je me suis demandé au début. Parce que, l’extincteur d’Arthur, il allume tout. Il incendie. La référence à Fahrenheit 451 de Ray Bradbury est bien sentie. Arthur, de l’extérieur, rien à déclarer: vie quotidienne du chômeur de base sans le sou avec femme et enfant. Sauf que de l’intérieur, ça brasse en tabarnak. Arthur, écrivain pas lu (comme presque tous les écrivains) cherche un sens à la vie qui, selon moi, n’en a pas, mais il lui il cherche. Il cherche du travail, il cherche à écrire, il cherche des réponses à ses angoisses, ses souffrances (page 60!) existentielles. Les séances chez le psy, le “magicien”, sont pathétiquement désopilantes car le magicien n’en a strictement rien à foutre de ses (im)patients, il a une maison à retaper dans le Sud, lui. À chacun ses problèmes. Le pauvre Arthur, l’écrivain à la confiance en berne voit bien qu’il perd son temps mais il y gagne sa dose de drogue mensuelle utile pour se désaccoutumer des drogues qu’il ne supporte plus. C’est cornélien. La religion est ouverte à heures fixes, un business comme un autre, l’alcool est une solution (c’est scientifique), les citations pleuvent à heures irrégulières (ça aide) et la poésie l’emporte chaque fois. Arthur est un poète. On pourrait dire le monde avec des mots de tous les jours mais pas lui. Son monde est unique. Il ne peut être dit. Il ne peut-être que ressenti. Ce roman ose le ressenti. Nous, on n’ose pas dire, c’est trop intime, ça, on ressent bien des trucs mais on se la ferme, on va pas s’exposer quand même. Mais pas Arthur. Il compose sa symphonie intérieure comme elle surgit, en inventant parfois des mots car les lexiques officiels sont incomplets. Il se lâche, hurle dans le menu que sa vie est de la merde, que ses rêvent ne mênent à rien, qu’il ne réalise pas ses grand voyages et que le temps qui passe le rapproche à une vitesse vertigineuse du grand écran avec le mot FIN en cinémascope. Ses cris, ce sont les nôtres que nous taisons. Et plus tu lis ce roman et plus tu t’attaches. Tu finis par trembler et par ne plus sourire car ce livre, c’est toi! Quand tu comprends ça, ben, si t’es pas débile, t’es ému. C’est un roman hautement intime. La gloire est de s’élever vers l'extérieur, Arthur, lui, il s’élève de l’intérieur. Il nous tient par la main. Du grand art! 


Alain Raimbault (qui a son quart de minute de gloire page 197, merci!)




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