Lu en mars 2017: Le monde est mon langage, d'Alain Mabanckou (Grasset). En plus d'être un excellent romancier, Alain Mabanckou sait présenter la littérature d'un pays ou d'un auteur en quelques mots, et soudain tout s'éclaire. Glissant devient alors plus saisissable. Nous (moi, surtout) découvrons des auteures comme Suzanne Kala-Lobè ou Bessora. Ce sont des rencontres vraiment émouvantes et passionnantes avec Le Clézio, Sony Labou Tansi, Gary Victor ou Zéphirin Métellus dans une rue de La Nouvelle Orléans. Ce livre est réellement merveilleux car le lecteur apprend, découvre, s'émeut, sourit, et voyage en poésie. Un régal.
vendredi 10 mars 2017
samedi 18 février 2017
Mark SaFranko : Putain d'Olivia / 13e note éditions, 2009
Mark SaFranko : Putain d'Olivia / 13e note éditions,
2009
(Hating Olivia, 2005)
On embarque avec
« Putain d’Olivia » pour un voyage sans fond dans une Amérique
industrieuse des années 70 où l’absence d’un billet vert en poche te conduit
direct en enfer. Max, jeune musicien sans le sou mais aux rêves plus grands qu’un
continent rencontre Livy dans un bar. Pas besoin de s’ébattre très longtemps
pour comprendre que leurs corps élastiques jouent dans la même ligue, quelle
que soit la position. L’idylle dure aussi longtemps que les factures sont plus
ou moins payées. Après cela, une nouvelle musique se fait entendre. Trouver un
job suffisant pour ne plus étouffer. Sauf que nos tourtereaux ne sont pas doués
pour la routine. Cette faculté n’est pas donnée à tout le monde, pas vrai? C’est
en pratiquant des activités parfois inattendues et toujours mal payées que Max
tente de fuir la poisse dans laquelle il se débat. Un jour, il le sait, il
finira par écrire un roman qui le conduira à la gloire éternelle. Oui, un jour.
Livy, elle, au début solidaire en amour voit très vite son équilibre vaciller.
Elle rue dans les brancards. Elle cherche une solution bien à elle, bruyante,
violente, pour sortir de l’impasse. Sa vie ne mène à rien. Incapables de se
quitter, Max, le narrateur, et Livy, la belle au passé mystérieux et torturé,
forcément, se déchirent en technicolor dans leur minable appartement.
Le roman carbure à
mille miles à l’heure, ponctué de scènes sulfureuses où le corps, cet animal de
base, a ses raisons que la raison n’entend pas, vraiment pas. Une langue vive,
orale, offre une proximité immédiate entre le narrateur et le lecteur. Pas de
chichi. Les actes sont nommés, les lieux décrits dans leur apparente
simplicité, les actions s’enchaînent chronologiquement et l’on craint que la
mort ne soit la seule issue. On boit, on fume, on lit, on baise, on glande, on bâfre,
on turbine et on consomme compulsivement. Roman fascinant car il décrit en
détail nos angoisses d’artiste raté et les compromis aliénants dans lesquels
nous nous vautrons afin d’esquiver nos propres démons. Du vécu à l’état cru.
Alain Raimbault
mercredi 20 avril 2016
Nuit debout 20 avril 2016
Nuit Debout
Aujourd'hui, mon opinion dans le journal Métro de Montréal
Nuit debout
Après une manifestation contre la «loi Travail» en France, des gens de tous les horizons se réunissent sur les places publiques afin de libérer la parole, de s’exprimer simplement en public sur des enjeux de société. Le mouvement, je pense, va se développer aussi à Montréal et dans tout le Québec. Pourquoi? Parce que le discours politique est contrôlé par les partis. Un parti politique pour lequel je vote ne véhicule pas mes idées à 100 %. Il reste une part importante de mes opinions qui n’est pas véhiculée, discutée dans les parlements. Lors du formidable printemps érable, ce fut une éclosion merveilleuse d’idées, d’expressions, de rencontres, de créations, de contestations. Nuit debout remplit une fonction essentielle de rencontre et d’échanges pour toute communauté dans un endroit matériel, physique, humain. Les médias électroniques ne peuvent remplacer la vraie rencontre. Je prédis et je souhaite un vaste mouvement pacifique d’échange d’idées sur la place publique.
Nuit debout
Après une manifestation contre la «loi Travail» en France, des gens de tous les horizons se réunissent sur les places publiques afin de libérer la parole, de s’exprimer simplement en public sur des enjeux de société. Le mouvement, je pense, va se développer aussi à Montréal et dans tout le Québec. Pourquoi? Parce que le discours politique est contrôlé par les partis. Un parti politique pour lequel je vote ne véhicule pas mes idées à 100 %. Il reste une part importante de mes opinions qui n’est pas véhiculée, discutée dans les parlements. Lors du formidable printemps érable, ce fut une éclosion merveilleuse d’idées, d’expressions, de rencontres, de créations, de contestations. Nuit debout remplit une fonction essentielle de rencontre et d’échanges pour toute communauté dans un endroit matériel, physique, humain. Les médias électroniques ne peuvent remplacer la vraie rencontre. Je prédis et je souhaite un vaste mouvement pacifique d’échange d’idées sur la place publique.
Parce qu’il est important de poursuivre le dialogue entre nous.
samedi 24 octobre 2015
Poème J'invente
Poème
https://www.youtube.com/watch?v=Qo1_njDTc5E
J'invente - d' Alain Raimbault lu par Yvon Jean Radio Centre-Ville :www.radiocentreville.com/
ce 23 octobre 2015.
Un grand MERCI à l'ami poète Yvon Jean
J'invente mes visions
je prends le temps pour mes passions
la ville blanche se consumme
par tous les stades qui m'allument
ni vent ni inventeur ni inventaire
je vois pour ne plus taire
je prends ce qui se tait
ni la vie ni la Terre
ne m'attachent
ce temps qui colle à tout
me livre comme on lâche
prisonnier en raison
ma cavale est révision
tout vu pour la première fois
je dis comme on se voit
j'invente mes divisions
armées de dérision
j'invente
j'inventaire
Alain Raimbault
dimanche 23 août 2015
Ulan Bator, de Richard Tabbi, éditions du Riez, 304 pages, 2015. Préface de Ludovic Lavaissière
Ulan
Bator, de Richard Tabbi, éditions du Riez, 304 pages,
2015. Préface de Ludovic Lavaissière
Après l’alcoolique et
jouissif Zombie Planète publié chez
Mango et la psychédélique entourloupe havraise de Moi & ce diable de blues écrit avec son ombre éclectique j’ai
nommé Ludovic Lavaissière qui est ici l’auteur de la préface, Richard Tabbi en
remet une couche, toujours aux Éditions du Riez. Ulan Bator est un road movie collant, indélébile, qui vous prend au
mental et qu’on ne peut lâcher sans avoir des restes de glue Uhu© séchés par
endroit entre les neurones. Pas facile de se faire courser par des caïds mongols,
Mastic et Bleu Pétrole, déconcentrés par des sextoys pour androïde, quand tu
traînes ton bébé Tom sur le dos et qu’Asako, ton top model japonais de femme t’appelle
sans cesse lors de sa tournée internationale d’artiste célèbre afin de te faire prendre conscience de ta folie grave.
Tu cours, tu flingues, tu te tires des griffes des russoïdes mafieux en visant
juste, la balade du zoo de Moscou est à ce sujet un passage d’anthologie. Tu
picoles juste ce qu’il faut entre deux météorites et les monastères slaves peuplés
de commandos monastiques martiaux ne sont plus, mais alors plus du tout ce qu’ils
auraient dû être. Un vrai régal qui, en plus du délire kérouacquesque, réside
dans les descriptions. Notre halluciné héros Solo Aggrigente, renommé selon les
doses intra sanguines de matières plus ou moins venimeuses en Hotchkiss
Baïkonour, auteur des aventures de Roméo Tartarski et de Jéricho
Tête-de-Mouche, notre héros donc rencontre de merveilleux personnages comme
(page 194) «… deux lesbiennes enrichies
par les aberrations du Marché de l’Art Contemporain, et (…) un couple stressé
malgré l’affichage cool qui clignotait… » Plus loin, (pages 243-244-245) « Un
type… portait des lunettes à quadruple foyer et des chaussons à l’effigie de Spiderman. » Sa femme « …
arborait une permanente plastifiée auburn et une blouse bleue élimée sur des
bas couleur chair. » De temps à autre, un mort, un Alien, Sigourney Weaver,
Harald Kamsün et une citation du fameux Herman Klausevitz parce que la
mort sans sexe manque terriblement de saveur, n’est-ce pas? (page 279): « Je branchai les fils, mais la saloperie ne
voulait pas redémarrer. J’ouvris sa poitrine, cherchant la cause du faux
contact, englué de sang synthétique. Ses yeux opaques reflétaient le néant,
mais j’en avais rien à foutre, de ses yeux. Tandis que ma bite durcissait
encore je transpirais en m’efforçant de trouver la panne qui paralysait cette
pute androïde qui m’avait lâché en pleine fellation alors même que je m’apprêtais
à jouir. »
Encore une fois, ce roman épique à la liberté de ton
totale est un véritable enchantement. C’est drôle, acide, grinçant, polluant,
hallucinogène, prophétique, déjanté et généreux. Richard Tabbi nous en donne
plein les mirettes. Ses mots vont beaucoup plus loin que le lecteur. C’est
merveilleux et magistral. OK, j’arrête, mais je vais relire, c’est sûr.
http://www.editionsduriez.fr/boutique/nouveautes/ulan-bator/
Alain Raimbault
samedi 9 mai 2015
Journal Métro de Montréal fin avril 2015
Voici trois photos que j"ai prises publiées sur le site du journal Métro de Montréal le 24 avril 2015
http://journalmetro.com/dossiers/mon-scoop/763140/exposition-desaparecidos/#
À l’UQAM, on peut voir une exposition attirant l’attention sur les 43 étudiants disparus au Mexique en septembre dernier.
http://journalmetro.com/dossiers/mon-scoop/763135/demonstration-de-danse-de-rue-a-berri-uqam/
Jeudi soir, une démonstration de danse de rue a eu lieu à la station de métro Berri-UQAM.
http://journalmetro.com/dossiers/mon-scoop/763131/autobus-en-feu-sur-lechangeur-turcot/
http://journalmetro.com/dossiers/mon-scoop/763140/exposition-desaparecidos/#
À l’UQAM, on peut voir une exposition attirant l’attention sur les 43 étudiants disparus au Mexique en septembre dernier.
http://journalmetro.com/dossiers/mon-scoop/763135/demonstration-de-danse-de-rue-a-berri-uqam/
Jeudi soir, une démonstration de danse de rue a eu lieu à la station de métro Berri-UQAM.
http://journalmetro.com/dossiers/mon-scoop/763131/autobus-en-feu-sur-lechangeur-turcot/
lundi 26 janvier 2015
Dieu bénisse l'Amérique, de Mark SaFranko. critique
En janvier 2015, j'ai eu le bonheur de lire ce livre et voici ma critique, que Mark a lue, ainsi que Karine, la traductrice. Les médias sociaux, c'est extraordinaires, quand même.
http://www.aubarfly.com/tim-lobster-a-lu-dieu-benisse-lamerique-de-mark-safranko/
Dieu bénisse l'Amérique, de Mark SaFranKo
http://www.aubarfly.com/tim-lobster-a-lu-dieu-benisse-lamerique-de-mark-safranko/
Dieu bénisse l'Amérique, de Mark SaFranKo
Mark SaFranKo, Dieu bénisse l’Amérique, 13e
note éditions, Paris, 2012, excellemment traduit de l’anglais (États-Unis) par
Karine Lalechère
L’alter ego de l’auteur,
Max Zajack nous raconte sa jeunesse dans une famille pauvre d’émigrés polonais,
quelque part en Amérique, côte est. Années 50, début 60, la pauvreté ressemble
à une malédiction héréditaire. Le père de Max, Jake, enchaîne les petits
boulots de crève-la-faim jusqu’à devenir pompier. Si l’on espère une
amélioration de la situation familiale, on a tout faux. L’espoir n’est pas de
mise. La misère crasse reste la même. Dans une société de classes comme celle
des États-Unis d’après-guerre, aucune élévation de quelque sorte n’est
possible. Bien au contraire. Jake se sent impuissant contre le sort qui
s’acharne sur lui alors comme un rat en cage, il enrage et mord tout ce qui
l’approche. Il cherche des coupables car il se dit victime d’un système qui le
dépasse. Des coupables? Ce sont les Noirs, les « bamboulas… responsables
de tous les maux de la Terre. » En plus d’être raciste, Jake est violent.
Max reçoit des raclées environ toutes les dix pages, soit par son paternel,
soit par ses camarades de classes prêts à t’estourbir ou à te brûler vif pour
un regard de travers, soit par ses institutrices catholique qui répandent
l’amour de Dieu à coups de torgnoles et de chicotte, soit par les gangs de rue
que Max a le malheur de croiser. Quand ce n’est pas sa mère qui l’assomme en
public ou le coiffeur qui lui plante sa paire de ciseaux dans le cou en
clamsant raide net devant lui. Max, il n’a pas de chance.
Il
grandit dans un monde apocalyptique peuplé de fous (sa mère Bash, l’oncle
Henry, dans la rue, les voisins, au travail, les cinglés sont partout), de
criminels (ses amis, ses collègues), de pédophiles et de demeurés bouseux (voir
la rencontre familiale au Canada chez des éleveurs de porcs dont tous ne sont
pas doués de la parole…). Les relations de Max avec les femmes, possible source
d’espoir, relèvent du fiasco. Lorsqu’il se fait passer pour un membre du FBI
afin de peloter la belle Sandy, la police lui tombe sur le paletot et la Mafia
menace de l’éliminer. Les femmes, c’est dangereux.
Ce livre se dévore comme on assiste en voyeur à une série
d’accidents de la route, voire à une longue séance de torture. L’unique bouée
de sauvetage est l’humour, seule distance possible entre la vie et le
narrateur. Par exemple, lorsque son ami Joey lui explique la mécanique du
sexe : « Tu plaçais ta bite à côté de celle de la fille… vous
les frottiez l’une contre l’autre et au final, on obtenait un bébé. » Peu
avant cette explication, le narrateur avait précisé : « Plus
tard, je devais me rendre compte que sa théorie comportait quelques
faiblesses. » Faiblesses ou pas, le sexe conduit toujours à la
catastrophe.
Pas besoin d’être sorti de la cuisse de Jupiter pour
comprendre que contrairement au titre, Dieu à maudit l’Amérique. Comment
poursuivre le bonheur quand le destin du peuple ouvrier est joué d’avance? Le
rêve américain, c’est d’éviter de mourir trop vite. Et ce n’est pas joué
d’avance. Quand tu ne meurs pas de faim ou de maladies transmises par les
souris, les rats, les poux et la vermine, quand tu ne te suicides pas, quand tu
survis à divers accidents plus scabreux les uns que les autres, quand on ne
t’assomme pas ou quand tu ne te prends pas une balle perdue, le pays a toujours
la possibilité de t’envoyer te faire tuer dans le Pacifique ou au Viet-Nam. Et
l’avenir, dans tout ça? Max rêve d’une gigantesque explosion nucléaire qui
règlerait ses problèmes.
Dans sa post-face, l’éditeur Zslot Alapi
affirme : « Le monde littéraire devrait avoir peur de ce
roman… » et il a tout à fait raison car cette fiction secoue profondément
le lecteur. Mark SaFranKo fait plus que du vrai et du beau genre Baudelaire, il
frappe là où ça fait mal, à l’humain de base. Il torpille à jamais le roman
d’apprentissage. La prose de SaFranKo, c’est du Zola désespéré qui a lu Bukowski,
Fante et Carver. J’en suis resté estourbi.
Alain
Raimbault
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