dimanche 31 octobre 2021

«La saveur des derniers mètres», de Felwine Sarr

Lu: «La saveur des derniers mètres», de Felwine Sarr, éd. Philippe Rey

Recueil de récits de voyages, l’auteur nous entraîne dans son sillage à travers ses pérégrinations. Des îles de Diogane, Bassar, Thialane jusqu’à Niodior natal en passant par Kampala, Lisboa, Cuernavaca, Douala, Dakar, Rome, New York, Port-au-Prince ou Montréal ou Istanbul, entre autres. J’ai menti car les voyages sont intérieurs. L’auteur préfère sentir l’écho des lieux en lui plutôt que de s’attarder sur les sites touristiques entendus… J’avais un ami en Nouvelle-Écosse qui avait passé deux ans à enseigner l’économie en Chine. Lorsqu’il est revenu et qu’il m’a montré ses photographies en couleur (vous savez, dont l’origine est la lumière prisonnière d’une pellicule, tirées sur papier), je n’ai ni découvert la célèbre muraille, ni le palais impérial de Pékin (on dira Beijing plus tard), non, il n’avait pris en photo que les gens, ses collègues de travail et ses étudiants. Il a dit: c’est ce qui m’intéressait le plus. Felwine Sarr fait un peu la même chose. Il s’attarde sur les lieux afin de montrer comment ils résonnent en lui et bien sûr, ce sont surtout les rencontres, organisées ou inattendues qui l’intéressent davantage. Il prend en photo les conversations, l’essence des conversations, en quelque sorte. Plus je lis ce livre et plus je me rends compte qu’il est en fait une ébauche de livre de sagesse, un recueil de poésie, une recherche intérieure, la quête de la voie, du «do». Je ne suis pas quelqu’un de religieux qui va croire en un Dieu ou en une religion. Je pense qu’après la mort, c’est fini, un peu comme lorsqu'on s’endort sous anesthésie générale et lorsqu’on se réveille, il ne reste rien de ce temps passé hors conscience, sans rêve. La mort est pour moi une sorte d’anesthésie générale, ce temps de rien. Alors, je considère les livres dits sacrés comme des œuvres littéraires, des récits de traditions orales fixées sur le papier. Je crois davantage en la poésie. Tout bon poème est pour moi une œuvre sacrée. Et ce livre de Felwine Sarr doit être considéré ainsi: comme une poésie sacrée.

Citation, pages 118-119: «Considérer que tout m’a été gracieusement donné. La vie, le temps imparti, l’air que je respire, les mots de la langue que je parle, les pensées qui me viennent à l’aube, le sourire fugace, ce soleil que je hume. À mon tour, de ce vécu, il va bien falloir que je partage les fruits de saison. C’est pourquoi, pour moi, est fondamental le geste de la transmission. J’ai vécu, j’ai creusé, et il me semble qu’il y a quelque chose que j’ai touché, vu, reconnu, trouvé qui m’a aidé à vivre et qui pourrait être utile à autrui. Puisque je dois partir un jour, pourquoi le garder pour moi? J’ajoute, si possible, à la vie qui m’a été donnée, du viable, des provisions pour l’approfondir et en densifier la texture. Seulement ce qui ajoute de la vie à la vie me semble digne d’être transmis.»



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